L’église en détail

Eglise Saint Etienne de Franchesse

C'est un édifice intéressant, d'un plan bien complet qui comprend une nef à trois travées et collatéraux, une abside semi-circulaire, un transept avec absidioles circulaires et, sur la croisée, un clocher carré.

Elle appartient au style roman et a peut-être été bâtie par les moines de Souvigny, à la fin du XIIème siècle ou au début du XIIIème. Les premières travées des bas-côtés ont été remaniées au XVème siècle.

Les nefs sont séparées par des piliers carrés cantonnés de quatre colonnes. Les voûtes affectent la forme d'une quille de navire renversée. L'abside circulaire principale offre des particularités intéressantes. A l'intérieur, les trois ouvertures en plein cintre sont séparées par deux arcs en mitre. A l'extérieur, une succession d'arcatures aveugles orne la partie supérieure de l'abside.

Le clocher est composé de deux étages. L'étage inférieur est orné de quatre arcatures aveugles tandis que l'étage supérieur présente quatre arcatures ouvertes, séparées par des colonnettes jumelles. A noter également les deux colonnettes superposées qui adoucissent les angles du beffroi. Une couverture en essence de châtaignier remplace aujourd'hui l'ancienne flèche de pierre.

A l'intérieur, plusieurs chapiteaux sont dignes d'attention. Le chapiteau H4 (cf plan) semble figurer la scène du mariage. En face, en G2, la Vierge tient son fils sur les genoux, une main levée pour bénir. A sa droite, le sculpteur a placé un ciboire très élevé, et à sa gauche, un petit homme supportant une tête d'animal.

Cette église a été classée Monument Historique par arrêté du 12 juillet 1886.

Extrait de « Inventaire archéologique du canton de Bourbon » de l'Abbé CLEMENT

Plans de l'église datant de 1882

Dessins - Yves DUCOURTIOUX

Croquis

Dalle funéraire située à l'entrée de l'église (côté gauche)

Photos de l'intérieur du clocher de l'église Saint Etienne

Photos de l'intérieur du  clocher de l'église Saint Etienne

Photos anciennes

Françoise Clémençon, femme Chaput ou comment l'église de Franchesse fut sauvée de la destruction

Le vendredi 16 mai 1913, nous rapporte le curé Soulier dans ses notes, Mgr Penon, évêque de Moulins, venu pour la première fois en l'église Saint-Etienne de Franchesse pour donner le sacrement de Confirmation, fut très impressionné par ce remarquable édifice. Et il lui fut raconté comment cette belle église avait été sauvée pendant la grande Révolution par le courage et la foi des femmes du bourg.

En 1791, l'église de Franchesse, comme celle de Limoise et la Sainte Chapelle de Bourbon, avait été vendue comme bien national par le District de Cérilly, conformément au décret du 3 novembre 1790. L'acheteur était le sieur Nicolas, de Bourbon, qui avait certainement vu en ces édifices une source de revenus non négligeable par le volume de pierres qu'ils représentaient. Son intention était donc de les détruire, ce qui fut fait pour l'église de Limoise et la Sainte Chapelle de Bourbon. Mais pour l'église de Franchesse, la tâche fut plus ardue, même impossible, car chaque fois que les démolisseurs se présentaient, toutes les femmes du bourg accouraient aussitôt, bien armées et bien disposées à "démolir" les ouvriers. Elles étaient averties par l'une d'entre elles qui sonnait de la trompette quand le danger se présentait. Il s'agissait de Françoise Clémençon, née à Couzon où elle fut baptisée le 16 mars 1773, fille de Pierre Clémençon, locataire. Après son mariage avec le sieur Chaput, elle a toujours habité dans le bourg de Franchesse, dans la maison qui est aujourd'hui le garage de M. Léger, où elle est morte le 16 décembre 1857, dans sa 85ème année.

Françoise Chaput, grande et forte femme brune, jurait constamment pour la moindre chose. Aussi, quand Nicolas et ses ouvriers se présentaient, elle les accueillait en ces termes: "B... D... de B.. D... Sacré N.... de D..., je vous défends de toucher à notre église et si vous y touchez, je vous effondre avec mon gouyard (1), B... D... de B... D...., sacré nom de D...". Son ton énergique et décidé excitait la colère des autres femmes, elles aussi accoururent avec bâtons, fourches et gouyards; et plusieurs fois, Nicolas et ses ouvriers durent battre en retraite. Les femmes se remplaçaient alors pour monter la garde autour de leur église et empêcher un retour inopiné des destructeurs .

Donc, depuis le XIIème siècle, où elle a été construite, l'église est le témoin continu de toutes les joies et peines des Lanciers (2). Ses pierres ont pu enregistrer les chants funèbres de la longue suite des habitants qui nous ont précédé sur cette terre de Franchesse. Peut-être se souviennent-elles, dans leur pénombre, de la foule de ceux dont les maisons sont aujourd'hui écroulées, de ceux dont les familles sont dispersées, de ceux dont le nom même est oublié. Cet édifice a été sauvé de la destruction à la fin du XVIIIème siècle par quelques femmes; il faut souhaiter que notre XXIème siècle, avec ses moyens techniques énormes, puisse le préserver d'un autre ennemi qui le menace : le temps qui passe et qui use, afin que la vigilance de ces femmes avec leurs gouyards n'ait pas été vaine et que puisse se continuer cette longue permanence de neuf siècles déjà.

(1) serpe à long manche utilisée dans la région pour tailler les haies.
(2) habitants de Franchesse

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André DESPRET